Le Parti impérial en tête... !
Autopsie d'une victoire
Les résultats du 1er tour des élections législatives d'août 1927 sont tombés ce mercredi. C'est une victoire sans surprise du Parti conservateur qui, obtenant 133 des 230 sièges de députés, est dès avant le second tour assuré d'obtenir la majorité absolue à la Diète.
Le parti impérial (PI) confirme ainsi son implantation dans le Chiron, terre d'élection de l'ancien Rassemblement démocrate conservateur d'Edoran (RDCE), et dans les colonies, bastion privilégié de l'extrême droite édoranaise. Plus surprenant, le PI s'implante durablement dans les provinces de Bonne Espérance et d'Alliancia, même à Mont-Albert, fief électoral de la droite religieuse édoranaise, traditionnellement opposé au discours laïciste du Parti Impérial.
Le gouvernement du Chancelier Hauteville, qui devrait sans nul doute possible être reconduit la semaine prochaine, récolte ainsi les fruits d'un discours régalien focalisé sur la refondation des institutions ayant su parler à toutes les droites. Il bénéficie aussi de la traditionnelle prime au sortant alors que le gouvernement est approuvé par une majorité de la population dans sa conduite des affaires extérieures du pays
Cette victoire ne doit pas faire oublier l'enjeu du scrutin : la réforme constitutionnelle voulue par la Chancellerie et approuvée par le Palais qui doit aboutir à la fédéralisation de l'Empire. Afin de conduire son projet de réforme constitutionnelle approuvé la semaine dernière en conseil des ministres, le Chancelier Hauteville doit pouvoir compter sur une majorité des 2/3 à la Diète, soit 154 députés. S'il veut conserver les mains libres et légiférer sans la contrainte d'une opposition progressiste-libérale, il doit donc ravir, la semaine prochaine, 21 des 26 circonscriptions encore en jeu en Fransie. Une gageure dans une province où les libéraux ont obtenu leurs meilleurs scores au premier tour et peuvent compter sur les réserves de voix de la Ligue progressiste, grande perdante de ces élections.
Car l'autre information de ce scrutin est la percée de l'Alliance Libérale menée par la fougueuse Eugénie de Sabrevoix, fille du célèbre militaire Klaus Störtebeker et sœur du roi Stanislas de Palogne. L'Alliance libérale, formation située au centre de l'échiquier politique, avait servit, durant les précédentes législatures de caution libérale au Parti Impérial. Ce soutien au parti impérial, au moment du 1er gouvernement Klausbourg, avait été le fruit d'une alliance que d'aucun jugeait contre nature mais qui était pourtant imposée par les circonstances : celles du choix de l'ordre et de la prospérité économique face à la gabegie socialiste représentée par gauche. Elle permit de tempérer les ardeurs du Parti impérial et contribua à son installation comme parti de gouvernement, loin des excès de ses origines.
Avec 65 députés élus dès le premier tour, l'Alliance Libérale peut s'imposer dans la prochaine majorité comme le véritable leader d'une opposition dont il est tout à croire, au regard de l'histoire de ce parti et de la personnalité de sa présidente encore présent au gouvernement, qu'elle sera plus constructive qu'obstructive. De là à croire que l'Alliance Libérale est l'œuvre politique d'un Hauteville pour capter les voix de la gauche, c'est un pas que nous ne franchirons pas.
Le grand perdant de ces élections est la Ligue progressiste. Le mouvement politique dirigé par Albert de Rougemont, ancien leader du Parti démocrate édoranais désormais interdit, est réapparu lors de ces élections. Elle entendait incarner une ligne de gauche sociale-démocrate et progressiste, loyale à Sa Majesté. Elle n'a pu résister à la vague violette qui a submergé le pays et à la concurrence de l'Alliance Libérale sur le terrain du progressisme. Elle n'emporte que 6 députés, se place dans une conjecture délicate pour le second tour et ne peut espérer en gagner plus de 9 mardi prochain. Nul doute que la Ligue progressiste devra s'arrimer à l'Alliance Libérale pour exister, mais au risque d'être phagocyté.
Le dernier enseignement de ce scrutin, celui qui est fondamental pour l'histoire politique édoranaise est la bipolarisation de sa vie politique dont la cause est à rechercher dans la disparition de la multitude de partis politiques qui l'animaient et constituaient des majorités hétéroclites. Elle est la conséquence de l'hégémonie du parti impérial à laquelle on peut attribuer plusieurs facteurs.
Tout d'abord un discours marqué idéologiquement : le thème de la défense de l'ordre et de la patrie, n'a en rien varié depuis ses origines. Ensuite, une discipline partisane à toute épreuve, explicable par un fonctionnement démocratique qui permet à toutes les sensibilités du parti d'exister associé à une forte culture du chef dans une formation politique où les militaires sont surreprésentés parmi les cadres. La victoire a aussi été rendue possible par la capacité à renouveler le discours partisan : l'atténuation du discours laïciste a permis de ne plus effrayer la droite religieuse, l'investissement du champ économique, la mise en place d'un discours socialement rassurant et économiquement protecteur à attirer les petits épargnants et les petits entrepreneurs, son discours social enfin, lui a permis de préempter la forte réserve de voix que constituait l'électorat populaire délaissé en l'absence des traditionnels partis ouvriers de gauche interdit par la justice. Sa réussite tient également à la richesse de son capitale humain, compétent et dévoué. On ne compte plus les hommes d'état où qui en esquisse la stature qui en sont membres : le Feld-maréchal de Hauteville, la maréchal de Lancret, le vice-chancelier d'Haudricourt. Enfin, le Parti Impérial a réussi l'expérience du gouvernement investissant le champ du régalien plutôt que celui de la réforme sociétale, capitalisant sur le maintien de l'ordre, condition à la prospérité économique, refusant l'excès et l'idéologie. Bref car l'on gouverne au centre, faisant l'éloge du pragmatisme.
Alexandre de Klausbourg,
Professeur de Science Politique à l'Université d'Allancia
Consultez la
carte des résultats électoraux publiée par l'Institut Edoranais de Géographie Micromondiale
Consultez
le détail des résultats publié par la commission électorale